Pierre-Alain était un inlassable curieux, passionné de sciences et de technologie, admirateur de la nature et des animaux, parfois méfiant des Hommes – mais sans se départir d’un authentique humanisme. « Tout un homme, fait de tous les hommes, et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui », se décrit Sartre dans une pirouette à la fin de son autobiographie. Pierre-Alain avait cette modestie de se prendre pour n’importe qui: avec ses connaissances techniques d’ingénieur, ses moyens, il ne se plaçait jamais au-dessus des autres: j’ai rarement vu quelqu’un détester autant le mépris de classe, d’où découlent les grandes injustices sociales. Est-ce pour cette raison qu’il ne pouvait pas s’empêcher d’aider ceux qu’il voyait souffrir? Tout le long de sa vie, il a aidé. Il reconnaissait lui-même qu’il avait un côté « saint-bernard » qui l’avait parfois enfoncé, mais contre lequel il ne pouvait pas lutter. Et dans ses excès, ses avis parfois tranchés, il n’y avait jamais la moindre trace de cynisme. Il savait aussi profiter des bons moments à partager. Plus Epicurien qu’Hédoniste, il était ouvert aux musiques de tous horizons, et vouait une passion pour la vitesse; le choix de ses motos aux grosses cylindrées ne trompait personne. Il adorait tout ce qui roulait ou glissait: des rollers à la trottinette, du vélo électrique au scooter, mais aussi le ski, le bateau, à voile ou à moteur… Et sans artifice mécanique, il aimait le sport sous toutes les formes – tous ceux qui ont joué avec lui connaissaient le compétiteur redoutable, exigeant avec lui-même, toujours fair-play avec ses adversaires. Difficile de comprendre d’où il puisait toute cette énergie, mais comment ne pas évoquer ses fils, dont il était si fier, et qui ont été ses piliers dans sa vie. J’ai perdu un ami et je sais que rien ne remplace ceux qui partent; mais lui a tout perdu ici-bas, lui qui aimait tant la vie. Les dernières années ont été difficiles, mais ce serait injuste de ne pas rappeler qu’il était un homme joyeux. Qu’un rien pouvait l’amuser. Qu’il aimait rire! Je dois dire, au nom de tous ceux que je connais l’ayant côtoyé, que sa disparition a beaucoup choqué et peiné, car tous avaient perçu sa valeur. C’est une chance et un honneur d’avoir pu compter parmi ses amis. D’avoir été là , dans sa vie, trop courte, semée d’embûches, mais aussi avec ses victoires, ses joies, et pleinement vécue. Et même cette maladie féroce n’en occultera pas le souvenir.
